en une : Cours philo : Dieu

étude du livre

Francais (college, lycee) > sujets expliqués - 16/10/2007 - correction
                
Bonjour,

Je suis tout d’abord très content de voir que les réponses qui vous sont apportées vous apportent une réelle plus value. Dans cette réponse, je vais essayer à la fois de vous apporter des éléments de fond et en même temps d’orienter vos révisions et apprentissages en fonction de l’exercice final dont l’étude fera l’objet et que vous décrivez dans votre question. Au passage, vous y insistez sur la méthode, encore une fois, je ne peux que vous encourager à approfondir et acquérir des méthodes, c’est la meilleure façon de progresser régulièrement et c’est toujours largement valorisé. Tout le monde peut buter devant un texte ou un sujet, mais si le correcteur voit qu’une méthode a été déployée, que des efforts ont été faits au-delà de la richesse des arguments, croyez-moi, il sera toujours amené à revoir la note à la hausse pour saluer ces efforts et ces acquis. Dernière petite réponse, plus « en off » également à votre réponse, sur la charge de travail : c’est vrai que la combinaison du français et des métiers scientifiques est souvent difficile à gérer en début de première S. Mais déjà c’est un temps énorme de gagner pour les révisions de fin d’année que de s’attendre à ses études de français comme vous le faites ; ensuite, je ne sais pas ce que vous envisagez après le lycée, mais sachez au passage que pour des filières assez générales (prépas, écoles voire même fac), ce temps passé à acquérir des méthodes et de la culture générale est aussi loin d’être perdu ! Ce sont du temps et des points parfois déterminants à certains concours que vous gagnez ainsi à l’avance. Le retard en la matière, une fois vraiment submergé par les sciences, est très difficile à combler et la lecture et la culture générale demandant beaucoup de temps que l’on a plus forcément dans ces moments-là, beaucoup se mordent les doigts de ne pas s’en être rendu compte avant ! Pour finir cette petite digression avant de revenir à votre question, je ne peux que vous encourager à vous accrocher à cette partie de votre scolarité sans négliger pour autant bien sûr le c½ur de vos études.

1) L’auteur : les biographies sont en effet nombreuses. Simplement, dans une étude comme celle que vous menez, on va vous demander de faire ressortir les éléments clefs de la biographie et notamment : formation, autres ½uvres, thèses majeures défendues. Voyez comment ces quelques éléments peuvent expliquer certains aspects du livre et éclairer votre lecture ; c’est essentiel et c’est sur ce genre d’analyse, même basée sur deux ou trois faits simplement, que vous pouvez faire la différence sans y passer un temps fou en terme de bibliographie. Interrogez-vous notamment sur son enfance (et la référence en ouverture à sa famille paysanne) et sur son écriture en plein conflit mondial : il vit dans une période agitée et ce qu’il a connu pendant son enfance semble révolu. Ce n’est donc pas totalement étonnant que quelqu’un qui voit ainsi ses repères s’évanouir et le monde changer ainsi veuille alerter ses contemporains sur certains changements du monde dans des formes comme la science-fiction, irréelle et s’interrogeant sur ce que pourrait être un futur encore plus imprévisible. Essayez donc vraiment de dégager quelques idées simples de ce type pour montrer comment la simple lecture de la biographie nous donne déjà des éclairages sur l’½uvre et nous aide ensuite à mieux la comprendre. C’est vraiment dans ce genre d’analyse que vus avez une véritable plus-value à apporter et que vous serez reconnu (et récompensé scolairement à hauteur). En même temps, cette orientation vous permet aussi de gagner du temps dans votre préparation en revenant vers l’essentiel.

2) Le genre : exact. Recherchez simplement le sens exact de science fiction et ayez un ou deux exemples plus anciens en tête. Si vous êtes interrogé à l’oral, il est très probable que le jury vous demande d’expliciter une notion littéraire aujourd’hui un peu galvaudée ; dès qu’on voit de fantastique ou de surnaturel, on parle de science-fiction ; or c’est un genre bien particulier : c’est un genre littéraire qui raconte des faits, des situations qui sont dans le futur mais totalement hypothétiques ; ce n’est donc pas forcément surnaturel mais suffisamment différent du présent pour que l’on puisse s’interroger et ne pas vraiment pas savoir si, au vu de ce qu’est le monde aujourd’hui, cela a ou non une chance de se produire. Pour finir, recherchez quelques éléments dans l’½uvre en ce sens : notamment la fondation d’une nouvelle société après une sorte d’apocalypse, dans laquelle toutes nos valeurs de progrès et modernisme auraient disparu. C’est très basique, mais comme il n’est pas impossible que vous soyez « titillé » dessus, autant vous y préparer et avoir quelques arguments solides pour mettre le jury en confiance.

3) et 4) tout à fait exact ; pour un oral, ayez en tête les faits majeurs de l’action de chaque partie et surtout comment elles se succèdent, se complètent, s’agencent et quels sont les quelques grands messages de chacune d’elle. Ayez suffisamment d’éléments pour expliciter, justifier le titre de chacune d’elle ; bref, montrez que vous avez lu le libre en rappelant quelques faits détaillés (c’est peut-être bête à dire, mais croyez-moi ce n’est pas évident pour tout le monde ! et pourtant oh combien rédhibitoire à l’oral !), et montrez que vous y avez réfléchi personnellement. Si vous faites déjà passer cela au jury avec quelques réflexions solides derrière, vous aurez déjà gagné confiance et crédibilité et pourrez continuer dans un climat qui vous sera très favorable (tout ceci est d’ailleurs valable pour l’oral du Bac également).

5) Intention de l’auteur : alerte et faire réfléchir ses concitoyens sur les dérives du monde dans lequel ils vivaient tous ; grossir les traits et aller du côté des situations extrêmes pour provoquer une prise de conscience. Il ne s’agit pas de tout rejeter en bloc et provoquer une vraie révolution mais de faire marquer un temps d’arrêt en montrant qu’il est peut-être temps de réfléchir vraiment. Cela s’accompagne d’une peur suscitée et d’un électrochoc assez radical (il faut toujours aller très loin pour que les gens soient convaincus et retiennent quelques pourcents du message). (D’ailleurs, Barjavel a lui-même dit que si le contexte historique avait été tout autre, l’½uvre, ses messages et sa façon de faire auraient elles aussi été tout autres). Il écrit pour des contemporains qui se retrouvent dans un contexte dans lequel le monde ne s’est jamais retrouvé et où une certaine sorte de fin paraît proche. Une des meilleures façons de provoquer un vrai rejet de ce qui se passe et de grossir encore les traits et montrer aux gens le fond, le pire pour que l’électrochoc soit total. On peut encore développer cette idée, sous des formes un peu différentes, mais l’essentiel est là et Barjavel lui-même a insisté là-dessus dans des interviews, plusieurs années plus tard. Vous avez donc là l’essentiel, voyez aussi en complément votre ressenti propre, ce que vous avez pensé de tout cela, l’effet que cela a produit sur vous ; nos propres impressions de lecteur sont souvent un bon de départ : avez-vous eu peur ? à quoi cela vous a-t-il fait réfléchir ? éventuellement changé ? et si vous aviez été jeune en 1942, qu’en auriez vous pensé ? que cela a-t-il suscité en vous ? Là encore, vous voyez que l’idée maitresse d’un livre, l’intention de son auteur, peut souvent se résumer rapidement ; il emploie de nombreux moyens pour dire la même chose, pour toucher tout le monde, persuader, « enfoncer le clou », mais ce qu’on attend aussi que vous ajoutiez, c’est votre réflexion personnelle. Sans mettre complètement en avant votre ressenti, vous pouvez en faire le point de départ d’une réflexion intéressante.

6) Un apologie est une histoire racontée pour faire réfléchir justement (ce sont typiquement, dans un autre genre, les contes de Voltaire : « Zadig », « Candide » etc.). Ils sont assez intemporels et racontent une histoire qui pourrait être vraie, se passer près de nous, mais qui est en général assez simple ; nous n’avons souvent qu’un aspect de la vie des personnages et de leurs faits, pour concentrer nos regards sur un thème en particulier. De ce petit conte, on peut alors tirer un message fort (dans « Candide » par exemple, ne croyons pas tout ce que tout le monde, et que tout va toujours bien, pour schématiser). Toute la partie qui décrit au début la vie avec les machines, en se concentrant sur cet aspect de la vie des personnages, relève de l’utopie : l’auteur montre ainsi que la vie « tout-automatisé » peut avoir du bon mais que des conséquences néfastes sont toujours à craindre, y compris une certaine perte d’humanité. En se concentrant sur cette unité de sens, il nous délivre ainsi un message fort, clair et simple. Vous pouvez trouver exemples de passages qui sont en fait des apologues ou font de l’½uvre un apologue. A ne pas confondre donc avec utopie, à ramener à son contexte originel : la société idéale, libre, sans règles et sans problèmes, celle du bonheur parfait, décrite par Thomas Moore. L’utopie c’est l’irréel parce que la perfection décrite ne peut de toute façon exister, que ce qui est décrit ne peut pas exister, on ne peut le concevoir. La description du Paris moderne du début de l’½uvre relève de l’utopie ; la fin également, avec la création d’une société sans machines et sans progrès. Il y a d’ailleurs ici une démarche de construction humaine en ce sens qui est tout à fait dans la lignée de T. Moore. Les éléments qui font de l’½uvre une utopie sont donc tous ceux qui décrivent une société parfaite mais dont on sait pertinemment qu’elle ne pourrait exister. La contre-utopie au contraire bien sûr c’est la société très réaliste qui démontre que l’idéal n’existe pas et que seul le très terre-à-terre peut continuer d’exister. La catastrophe naturelle, même si elle est peut-être un peu exagérée dans cette optique, peut tout à fait appartenir à ce registre. La fuite et l’attitude à tenir en cas de telle catastrophe (l’instinct de survie avant tout) de même. On est dans le réaliste qui ne peut être autrement. J’ai essayé de vous donner des points de repère pour chacun des trois genres et des exemples les accompagnant. Il y a ensuite à titre d’exercice d’autres points en ce sens à trouver.

7) Lecture : encore un petit conseil au passage, prenez le temps de vous exercer, les enseignants sont toujours très sensibles au fait que vous soyez capables de lire clairement un extrait d’auteur, en montrant que vous l’avez compris. Au bac, beaucoup d’examinateurs jugent de votre compréhension du texte par cette lecture, très révélatrice. Soyez également capable de dire rapidement pourquoi vous l’avez choisi (moment crucial selon vous, intérêt pour le style, le passage etc.). Car n’est aussi plus agaçant que ce qui paraît fait dans l’urgence, l’obligation et la nécessité, gratuitement, surtout pour une lecture pour des gens amoureux des lettres !

8) Les personnages : j’ai vu que vous aviez repris les notices de l’excellent site « barjaweb » ; rien à redire, c’est très bien fait ! Là aussi, essayez simplement de synthétiser et apporter une petite touche personnelle pour éviter la question de cours récitée et reliez les analyses faites aux grands thèmes de l’½uvre. Leur situation sociale (par exemple aisée) ou leur métier ou leur attitude dans telle situation ou leur trait de caractère dominant est au service d’une démonstration (par exemple, même les plus aisés n’échappent pas aux catastrophes naturelles et sont égaux avec les autres à ce moment-là). Appropriez-vous les analyses relevées et ce sera parfait.

9) Cadre spatio-temporel : le futur (jusque dans les années 2050) : cela renvoie directement au paragraphe précédent sur la science-fiction. A noter par contre du coup l’opposition avec la cadre spatial, beaucoup plus proche de nous : Paris, la France, le monde dans lequel nous évoluons mais qui se transforme tout simplement petit à petit ! En effet, pour rester crédible et interpeller, l’auteur ne peut pas changer tous nos repères d’un coup. Un sur deux permet de faire plus vrai, d’être plus percutant, car les gens peuvent se projeter (ils imaginent : c’est le pouvoir de la visualisation). On pourrait ensuite s’étendre sur ce qui est plus ou moins véridique ou très irréel dans les détails donnés sur le temps et l’espace, mais l’idée principale est là.

10) Le point de vue du narrateur n’est pas facile à analyser. Il a en effet un regard extérieur, omniscient pour parler en terme de point de vue et essaie dans l’ensemble de s’en tenir au fait, souvent avec précision et concision (nombreuses phrases courtes et rythmées, sujet, verbe, attribut). Et c’est cette façon de faire le récit qui nous dit d’abord que nous sommes face à un narrateur objectif. Pourtant, à de nombreuses reprises, il semble adopter le point de vue de François ou du moins avoir un regard très humain et parfois très partial (pas forcément dans le sens péjoratif du terme ; c’est simplement qu’on devine un certain jugement, un jugement qu’on homme pourrait porter). Cela est particulièrement vrai dans les épisodes charnières, important pour la suite du récit et marquant pour le lecteur. On peut donc dire que sous couvert d’être un narrateur extérieur limité à un rôle de récitant, celui-ci est quand même très engagé et est un maillon essentiel de la démonstration de l’auteur car il oriente malgré tout nos pensées et notre jugement vers l’avis de l’auteur. Mais comme c’est sûrement dans lequel Barjavel montre l’espèce humaine sous son pire jour, il n’est pas non plus inconcevable qu’un être humain vienne en quelque sorte juger les actes de ses pairs ; la condamnation par un homme des pires actes commis par ses collatéraux est aussi importante en terme de crédibilité et dans la démonstration.

11) La structure du récit : finalement, elle est assez classique : situation initiale, élément perturbateur, péripéties (de nos trois héros jusqu’à la fondation d’une société nouvelle), dénouement. Vous pouvez préciser cette partie de l’analyse en reprenant le découpage du texte entier selon cette grille très classique, les différentes parties sont je pense assez simples à identifier dans ce cas précis. D’ailleurs, remarquez que les titres des quatre grandes parties reprennent plutôt ce schéma si vous reprenez l’histoire de façon plus précise. Mais pour faire un passage tel, il faut encore une fois laisser des repères au lecteur et donc ne pas tout chambouler d’un coup, et notamment ses habitudes de lecture. Une structure donc plutôt classique, avec des moments forts et un cheminement quoi qu’il en soit très logique. Pour les deux dernières questions, vous voyez que finalement, les idées principales sont assez simples et courtes. Il faut en fait les redévelopper à l’aide des éléments plus précis vus dans les questions d’avant et à l’aide du texte lui-même. Ce sont des questions très classiques, des thèmes que l’on étudie dans toutes les ½uvres ; ce qui est intéressant c’est donc de dégager les points forts rapidement et ensuite de les comparer avec les points d’étude spécifique (ici, l’utopie ou les quatre grandes parties). Regardez aussi éventuellement comment le récit se construit autour des personnages, leur rôle dans chaque moment clef, quand on les découvre, quand on les quitte etc.

Pour finir, vous voyez donc une nouvelle fois que toute cette analyse littéraire doit se faire avec une certaine méthode pour être profitable et pour offrir au jury d’oral des éléments crédibles, qui montrent que vous avez à la fois travaillé des cours et en même temps pris le temps d’une certaine réflexion personnelle. Le jour de l’oral, ce sont aussi ces deux points que l’on va regarder de près pour vous juger.

Sur ce, je vus souhaite une bonne préparation de ce devoir et bon courage pour l’ensemble de vos travaux.
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