en une : Le lexique de français

Commentaire

Francais (college, lycee) > sujets expliqués - 30/10/2008 - correction
                
Bonjour,

Je commence par reprendre les différents points que vous avez notés :

- vous commencez déjà par une bonne réflexion : il faut bien avant tout trouver la thèse de l’auteur, voir comment il aborde le sujet, quel est le contexte. Il est donc essentiel de commencer autant que possible par replacer l’extrait dans le reste de l’½uvre, et ensuite dans le reste de la pensée et l’½uvre de l’auteur, le mouvement littéraire même – ici les Lumières. Cela vous permet de montrer en introduction que vous remettez les choses en perspectives ; de plus, cela peut éviter contresens et anachronismes, contresens par rapport à la pensée de l’auteur, et en même temps vous donnez des idées d’axes de lecture à développer par rapport aux idées couramment évoqu*ées dans tel ou tel mouvement. Ici, bien voir dans quel type de discours on est, qui sont les personnages, à quel type de thèses des Lumières le discours renvoie. Cela doit déjà éclairer votre lanterne, dans la mesure où vous avez le contexte et pouvez ensuite passer aux détails ;
- pour la comparaison avec un autre texte, on est là encore dans le remise en contexte, une sorte d’aide pour voir le même type d’arguments abordés, les mêmes procédés stylistiques etc. Par contre, le commentaire composé doit rester en grande majorité centré sur le texte : c’est lui qu’on cite, ce sont ses arguments qu’on explicite, ses procédés de style qu’on décortique. Le risque est d’aboutir à un devoir de comparaison de texte ou à faire des copier-coller dangereux voire du hors-sujet. Encore une fois, prenez avant tout cela comme une aide à la réflexion préalable, sinon danger !
- vous partez sur deux pistes d’axes intéressants ; simple rappel : il ne faut pas dissocier le fond de la forme, les deux doivent se compléter, être étudié à mesure de l’avancement du commentaire. Vous énoncez un argument de fond, commentez une idée, et de suite reprenez les éléments du texte (champ lexical, métaphore, emploi d’un temps ou d’un pronom etc.) qui illustre cette idée, pour rester encore une fois concret et centré sur le texte. Il n’y a pas de bon ou mauvais plan dans l’absolu, cela dépend aussi de ce que vous comptez mettre dans chaque partie au-delà du titre, mais nous reviendrons au plan ensuite.
- pour le point suivant, je ne vois pas trop où vous voulez en venir avec cette opposition. Le didactisme repose sur la pédagogie, la façon dont on présente et explique les choses pour les rendre comprises, les faire assimiler. C’est une façon pédagogique de procéder, une façon d’aborder un discours, une méthode. Par contre, le matérialisme est une théorie qui repose sur une explication très concrète, matérielle comme son nom l’indique, des situations. A priori, vous ne pouvez donc pas trop opposer une méthode, une façon de faire, avec une théorie. Regardez donc bien le sens précis des expressions et voyez comment vous voulez vraiment les opposer si opposition possible il y a avant de partir dans une direction peu heureuse.
- dernier point : très bon départ de questionnement sur un point fondamental : comment est-organisé le dialogue ? qui fait quoi, a quel rôle ? Avec ce point et le premier abordé, vous touchez du doigt l’essentiel du commentaire d’un tel texte : quelle est la thèse défendue par l’auteur, que veut-il nous dire ? et comment s’y prend-il ? (les procédés stylistiques habituels sont bien sûr à étudier, mais là la façon d’organiser le discours est déjà un macro-indice très important).

Il en ressort donc qu’effectivement, il faut bien comprendre ce que disent les personnages et vers quelle thèse on s’achemine … sans oublier le comment cela est mis en scène et en place par l’auteur. C’est de cette compréhension précise que va alors surgir le plan à suivre (un plan à suivre).

On est ici dans une sorte de maïeutique à la Socrate : un « savant » dialogue avec une personne d’apparence moins instruite, « intelligente » dirait-on aujourd’hui (c’est un peu le cliché du pauvre Socrate face aux jeunes gens bien instruits, avec ici une femme maitresse de maison face à un médecin) ; ce savant pense pouvoir apporter des réponses et définitions absolues et est poussé dans ses retranchements par l’autre personne, qui ne fait qu’interroger, reformuler pour s’assurer qu’elle comprend bien, mettre le doute ou du moins pousser son interlocuteur à s’exprimer le plus précisément possible. C’est une sorte de passes d’armes dans laquelle on remet (ou essaie de remettre en cause) des choses tenues jusque là pour vérité absolue, souvent du seul fait de la tradition ou du statut de celui qui les dit. Voilà pour la forme et le contexte, à vous ensuite de poursuivre toute cette analyse : regardez la longueur des répliques, le temps de parole de chacun, la ponctuation (notamment les points d’interrogation etc.). Etudiez aussi tout le vocabulaire de la reformulation, de la reprise des idées, de la confirmation etc.
Pour la thèse et les idées de fond cette fois, au départ tout semble partir sur la définition de la mémoire et puis très vite d’autres questions proches s’ajoutent. Ensuite, on s’achemine presque vers la « théorie des humeurs » antique. Il s’agit en fait de comprendre comment sont déterminés les comportements ou les aptitudes des êtres humains (ou vivants en général). C’est une sorte d’explication à base biologique qui est avancée : une partie du corps, de cerveau, est plus ou moins activée, en marche, et cela conduit à tous les comportements, toutes les facultés ou absences de facultés des êtres humains. Le médecin essaie de prouver qu’il y a ainsi une sorte de prédétermination contre laquelle on ne peut rien (tant pis pours les sots ! en quelque sorte). Melle de Lespinasse essaie de le faire reformuler, le pousser dans ses retranchements, pour essayer de railler, mettre à mal cette théorie. L’extrait n’aboutit pas à cette contradiction, on est simplement dans le début de la discussion et le déroulement – parfois un peu ironique – du discours par la jeune femme. En fin de discours, le médecin est pour l’instant toujours dans un discours assez radical sur sa position : le fonctionnement d’une partie du corps avec une certaine tradition détermine tout … jusqu’à l’amour ou du moins l’attirance entre les êtres !

Pour bien comprendre le texte et prendre en compte tous les aspects du texte, il faut partir dans ces deux directions et les explorer à fond, en n’oubliant pas de bien lier le fond et la forme, les idées et les procédés d’écriture.

En terme de plan, vous pouvez donc vous acheminer vers deux axes comme vous le disiez, mais un plus tourné vers la forme argumentative du texte (le dialogue, les reformulations, le rôle des personnages etc. : vous pouvez lier les deux par exemple en évoquant pour le fond le rôle d’accoucheur de Melle de Lespinasse – un peu comme Socrate – et pour le fond commenter les points d’interrogation, le champ lexical de la reformulation, de l’accord sur ce qui a été dit etc.) et un autre plus sur le fond du discours et la théorie défendue. Il faut aussi toujours aller du plus simple au plus compliqué, du plus visible et global (donc par exemple le style du texte : un discours maïeutique) vers le plus complexe (donc les détails de la thèse défendue).

Vous vous êtes donc posé de nombreuses questions et c’est très bien. Comme vous le voyez, l’essentiel est de bien investiguer tous les aspects de forme et de fond d’abord, après toutes les remises en contexte nécessaires, pour alors aboutir à un plan possible. N’oubliez pas de citer le texte, faire des transitions entre parties, montrer une construction logique du devoir, bien annoncer le plan en introduction et faire un bilan précis en conclusion.

En vous espérant vous avoir éclairé sur le texte et la méthode (une des clefs du succès du commentaire), je vous souhaite bon courage pour ce devoir.
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