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Le rôle de l'écrivain est-il de susciter la polémique?

Francais (college, lycee) > sujets expliqués - 11/12/2007 - correction
                
Bonjour,

Je comprends bien votre inquiétude première face à ce sujet, qui n’est pas si classique que cela dans son thème. On parle en effet dans les dissertations du rôle du poète ou de l’auteur de théâtre, ou même de l’essayiste mais rarement sous un angle d’emblée aussi précis et particulier que la polémique et le fait de la susciter. Pour vous en sortir malgré tout sans trop paniquer, commencez par faire faire une liste des ½uvres dans lesquelles vous allez pouvoir prendre des exemples ; repartez de la liste de vos lectures diverses que vous citez, sans forcément les prendre toutes mais en essayant de diversifier au mieux : variez les genres littéraires, les époques etc. Trouvez-en par exemple six ou sept, relativement diverses, et essayez de répondre pour chaque à la question suivante rapidement : « l’auteur suscite-il ici la polémique ? quel type de polémique ? dans quel but ? quelles ont pu être les éventuelles conséquences ? ». Cela vous permettra ensuite d’aborder le sujet avec quelques idées en tête, liste d’idées que vous pourrez reprendre à profit ensuite lorsque vous rédigerez et ferez votre plan.

Ensuite, revenons à l’application de la méthode de la dissertation. Même si le sujet est difficile, cela vous permettra toujours de construire une réflexion, et au-delà des exemples précis utilisés et de leur originalité, c’est bien cela qui est jugé : votre aptitude à construire une réponse adaptée au sujet, qui réponde au problème posé. La méthode vous aidera donc toujours à organiser vos idées, à les mettre en valeur et faire état d’une vraiment démarche, c’est essentielle pour aboutir à un résultant satisfaisant.

Premier point donc : définir les mots du sujet. « rôle » et « écrivain » sont relativement faciles à définir, mais il faut quand même le faire avec précision. Le rôle est à attendre au sens de but poursuivi par les auteurs, de la façon dont ils pensent contribuer à la vie de la société, la façon dont ils voient la finalité de leurs travaux. Il est important je pense d’insister dès la définition sur la notion de but et de voir pour qui (la société) cela est fait car susciter la polémique n’est pas gratuit, il faut trouver le destinataire (le reste de la société en fait) c’est un point essentiel du sujet. Pour « écrivain », il vous faut aussi rapidement vous interroger sur l’étendue de l’art des écrivains : il y a les essais, les romans, mais aussi dans l’absolu le théâtre et la poésie par exemple (surtout aujourd’hui, avec l’éclatement relatif des genres littéraires) ; à vous de voir où vous mettez la limite, mais plus vous serez large sur ce point (sans être hors sujet en plus), plus vous aurez d’exemples possibles et d’analyses à la fois différentes et complémentaires ; autant ne pas se priver de sources d’inspiration et de discussions ! Les deux derniers mots me paraissent alors essentiels ; bien sûr, vous avez les dictionnaires pour vous aider à les définir précisément et simplement à la fois dans le cadre de l’étude littéraire ici menée. Mais je vous invite à considérer en complément pour orienter votre discours les points suivants :

- dans « susciter » il faut bien voir qu’ici on s’interroge surtout sur la fonction de questionnement, de provocation du débat ; l’écrivain ne donne pas ici les réponses, les éléments du débat en eux-mêmes, il provoque ce débat justement (même si bien sûr, il doit utiliser certains de ces éléments pour provoquer l’un ou l’autre camp ou les tourner en dérision ou à l’extrême pour susciter les réactions). Au-delà donc d’un rôle classique de la littérature, qui serait de donner des clefs de compréhension et de réflexion, donc malgré tout des choses assez concrètes et détaillées, le sujet qui nous occupe ici est vraiment centré sur le phénomène de naissance du débat par la polémique, la provocation presque, et ce n’est qu’ensuite que l’écrivain pourra aussi au passage donner son avis et essayer de convaincre. Il faut donc bien considérer ce point pour ne pas être hors sujet et garder ce rôle plus classiquement étudié pour une ouverture en fin de devoir par exemple ;

- par « polémique » il faut entendre la notion de débat, mais presque aussi de provocation : on peut grossir le trait, dire les choses de façon exagérée par exemple pour mettre en lumière les problèmes (de toute façon, c’est rarement en écrivant les choses platement et exactement comme elles sont de façon presque inintéressante pour beaucoup qu’on peut susciter quoi que ce soit).

Ensuite, il faut définir la problématique : avec un sujet comme celui-ci, c’est plutôt facile : il s’agit de formuler le problème du sujet sous forme de question : reprenez le sujet : « le rôle de l’écrivain est-il de susciter la polémique ? ». Ce travail de définition préalable fait, on peut penser à l’introduction qui doit s’organiser comme suit :

- on amène le sujet par un sujet plus vaste (ou avec l’aide d’un exemple connu d’écrivain polémique, récent par exemple, pour se demander si c’est une généralité, quelque chose d’habituel etc.) ;
- on définit les mots du sujet ;
- on pose la problématique ;
- on annonce le plan.

En ce qui concerne le plan, encore une fois, l’essentiel est d’avoir une démonstration construite et logique qui traite vraiment du problème posé (c’est pour cela qu’il faut définir le champ d’étude et les mots du sujet précisément dès le début pour éviter d’être à côté). Vous pouvez donc en revenir tout d’abord, si vous n’avez pas d’autre idée, à un plan assez classique, comme ici le plan dialectique : thèse / antithèse / synthèse. Certes classique, mais il vous permet de discuter les deux opinions via des arguments précis et ensuite d’offrir une synthèse en fin de devoir qui soit une vraie réponse à la question posée. Pour chaque partie, notamment les deux premières, vous vous demanderez ainsi « pourquoi » on peut dire que oui ou non c’est le rôle de l’écrivain, et quelle en sont les causes, comment il s’y prend ; ainsi, vous pourrez dégager quelques idées pour chaque que vous n’aurez ensuite plus qu’à classer dans un ordre logique d’explication.

Pour vous aider à avancer, je vous donne une amorce de plan, qu’il vous faudra adapter à vos réflexions et vos connaissances personnelles, ainsi qu’à vos exemples précis. Votre plan doit en effet vous permettre d’aboutir à la conclusion de votre démonstration. Ainsi :

I – Oui, c’est le rôle de l’écrivain :

1) parce qu’il dispose de moyens littéraires propres à faire réagir : il peut utiliser des romans, des histoires fictives, grossir les traits sous couvert de faire rire, faire des passages par des procédés littéraires : c’est son rôle car il a les « bonnes armes » pour le faire ;

2) parce qu’il a le recul et la réflexion nécessaire pour identifier les thèmes sur lesquels il faut susciter la polémique : on ne peut pas parler de tout tout le temps, vouloir agir sur tout ; c’est donc le rôle de l’écrivain, observateur réfléchi de la société d’attirer l’attention sur les problèmes majeurs ;

3) à vous de voir quel autre type de raisons vous pouvez trouver : par exemple, vous pouvez revenir sur l’historique de ce rôle pour l’écrivain et la légitimité qu’ils se sont ainsi formés etc.

II- Non, ce n’est pas son rôle :

1) parce qu’il ne dispose d’informations suffisantes, il n’est pas assez dans la société, mais plus dans la réflexion que dans la vie concrète, économique et sociale par exemple ;

2) parce que le rôle de l’écrivain est de divertir ; la polémique, les projets etc. sont plutôt du ressort de la politique, de l’administration etc. Il ne faut pas confondre les rôles, ce n’est pas souhaitable pour les gens (des frontières sont nécessaires pour éviter les mélanges : « un temps pour tout ») ;

3) idem : voyez en fonction de votre propre matière comment organiser une troisième sous-partie basée par exemple sur l’inefficacité d’une telle démarche pour l’écrivain : ce n’est pas son rôle parce qu’il n’est pas crédible / n’a pas suffisamment de poids etc.

Le risque sur un sujet aussi précis étant quand même de trop opposer les sous-parties des grandes parties deux à deux : par exemple, l’écrivain a les moyens littéraires de le faire, puis en fait ne les a pas ; c’est malgré tout parfois inévitable parfois sur des arguments précis. Pour éviter ce genre de déconvenues, je vous suggère de prendre des exemples différents dans des ½uvres différentes pour les deux visions, de ne pas analyser le même exemple sous deux angles différents, c’est plus dangereux. N’oubliez pas non plus de ménager des transitions entre grandes parties, pour montrer le cheminement intellectuel. Cela doit notamment vous amener à la synthèse, le III- qui essaie de trouver une réponse plus adaptée, moins adaptée à la question. Je vous propose par exemple de développer en trois sous-parties progressives l’idée suivante : « c’est bien le rôle de l’écrivain, mais peut-être pas dit ainsi ; son rôle consiste certes à susciter la polémique, mais d’une façon plus globale que ce que laissent entendre les termes du problème : susciter c’est aussi donner des arguments, des matériaux de réflexion, des exemples précis, remettre en contexte etc. Il faut donc un complément plus constructif, plus complet au simple fait de susciter ». Cette idée sera à finaliser et exprimer précisément dans la 3ème sous-partie, mais les deux précédentes devront amener cela plus progressivement ; par exemple :

III Рsynth̬se :

1) certes, le fait de ne faire que susciter la polémique n’est pas toujours suffisant, malgré tous les « outils » de l’écrivain, de tout ce dont il dispose ; il peut manquer un côté plus concret, appliqué dans le discours, mais la base est là et il faut garder cette capacité de « provocation » ;
2) le regard de l’écrivain est malgré tout très intéressant, du fait de la capitalisation des idées et des pensées, mais aussi que les artistes d’aujourd’hui sont beaucoup moins coupés de la société ; leur éclairage, même s’il n’est pas complet, doit donc être donné : ils sont en quelque sorte des détonateurs ;

3) cf. ci-dessus idée directrice. Sans oublier qu’il ont un rôle donc de déclencheur et que tout cela doit ensuite être reprise et approprié par d’autres pour que tous débattent, se sentent concernés et que la réflexion commune et individuelle à la fois fasse avancer les choses.

En conclusion, vous tirerez le bilan de la réflexion, suivi éventuellement d’une ouverture brève sur un sujet proche.

Je vous laisse vous approprier ces éléments et les adopter à votre propre travail. Comprenez bien encore une fois que l’originalité du plan est certes toujours un bon point, mais que dans tous les cas, ce sont les arguments et la façon dont ils sont structurés que l’on note : le plan peut être classique, même s’il permet d’arriver au final très logiquement à une réponse pertinente et bien adaptée au problème, aucun problème, le résultat sera au rendez-vous. Pas de panique donc face à, un sujet désarmant, la méthode doit vous permettre, peut-être pas certes de briller absolument à tous les coups, mais largement d’assurer un résultat honorable (en respectant aussi bien sûr les exigences de forme : présentation, orthographe, qualité du français etc.).

Sur ces derniers conseils de méthode, je vous souhaite bon travail ; ne vous inquiétez pas, il n’y a pas de raison que vous n’y arriviez pas.
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