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Dissertation : le théatre

Francais (college, lycee) > sujets expliqués - 04/11/2007 - Question simple
                
Bonjour,

Ce sujet est assez long pour un sujet de dissertation et il n’est donc pas forcément facile de dégager de prime abord les points importants et d’arriver à un plan acceptable. Je vous propose donc de rebalayer rapidement le suite et la problématique, pour voir comment le plan que vous proposez peut y répondre, puis comment nous pouvons le faire évoluer pour être effectivement, comme vous le dites bien, plus précis et collant davantage au problème posé.

Les mots qu’il faut définir précisément et relier entre eux sont :
- recréation, à prendre au sens de transformation, de création partielle à partir de choses déjà créées ; ici la recréation, c’est l’adaptation, le changement par rapport aux conditions du moment et au but poursuivi ;
- création, démarche complète et totale, qui part cette fois de zéro complètement ;
- auteur : celui qui écrit le texte ;
- acteur : celui qui déclame le texte, joue la pièce ;
- metteur en scène : celui qui guide les acteurs dans leurs dires et dans leurs jeux, qui les aiguille et adapte au final le texte aux conditions de la représentation en question (public, acteurs, contexte de l’actualité etc.)

Ces définitions sont certes triviales mais pour bien traiter le sujet, il me paraît essentiel d’identifier déjà les trois types d’intervenants dans le processus que l’on étudie : acteur / auteur / metteur en scène et de bien voir le rôle académique, traditionnel, théorique de chacun, puis de voir concrètement, au cours des époques (car des changements surviennent également dans ce domaine), les rôles évoluent, se partagent, parfois se mêlent. D’autre part, il y a deux processus qui sont à étudier ici : la création et la recréation à partir des pièces d’auteur déjà écrites, deux processus parallèles et pas toujours faits au même moment par les mêmes personnes. Ceci bien mis au clair, on peut se pencher sur la problématique. La question à résoudre est : « pourquoi peut-on dire que le metteur en scène ou même l’acteur revisitent, créent quelque chose de nouveau ou recréent à partir de choses existantes lorsqu’ils montent ou jouent une pièce ? ».

Ainsi, la question à laquelle il faut répondre est « pourquoi ? ». Chacune de vos trois grandes parties doit donc apporter des éléments de réponse à cette question, donc chaque partie doit traiter d’un type de causes, de raisons, d’arguments. Chacune doit en quelque sorte commencer par « car » ou « parce que », schématiquement. Ces parties doivent aussi être progressives, allant du plus général, évident et global, pour aller, grâce aux transitions et à des liens logiques, vers le plus détaillé, le plus précis, le plus pointu. Les trois parties que vous proposez traitent donc bien de thèmes ayant rapport au travail de (re)création des acteurs et metteurs en scène : quel est leur pouvoir réel en la matière ? comment font-ils et pourquoi ? comment cela est-il aussi suscité par les auteurs eux-mêmes (quelle liberté leur donnent les auteurs en la matière lorsqu’ils écrivent leurs ½uvres). Il fait donc apporter des groupes d’arguments successifs, chacun montrant comment et pourquoi ces personnes se livrent à ce type de travail. Votre plan montre que vous avez bien compris de quoi il retourne et que vous avez identifié le type d’explications et d’arguments à creuser ; toutefois, comme vous vous en êtes vous-même aperçu, il reste un peu trop général et le lien entre les idées que vous voulez développer et la question précise posée n’est pas forcément évident et direct.

Je vous propose donc d’essayer de repartir de la trame suivante, qui combine votre analyse et celle que nous venons de faire ensemble :

1) le texte à jouer / mettre en scène couvre toujours certaines insuffisances, par exemple des oublis sur des détails de mise en scène (intonation de telle phrase qui ne fait l’objet d’aucune didascalie, absence de précision sur le moment exact de l’arrivée de tel personnage etc.). Le texte naît de l’esprit d’un auteur qui sait parfaitement où il veut en venir, quel message il veut délivrer ; l’auteur voit de plus surtout le style et l’écriture au premier abord, il ne songe pas toujours très concrètement aux difficultés matérielles de mise en scène par exemple ou que telle indication, claire pour lui, sera l’objet d’une controverse. Le processus de (re)création est donc en premier lieu assez bassement matériel si l’on veut, souvent du fait malgré tout de l’écrivain même si celui-ci ne s’en rend pas forcément compte. Ce processus est donc normal, naturel et est au final sain pour un spectacle réussi (une adaptation même un peu personnelle vaut toujours mieux qu’une incohérence laissée telle quelle ou un moment clef mal rendu à cause de considérations très matérielles).

2) Ensuite, ce processus est aussi rendu nécessaire par le rôle assigné aux théâtres par la société. Le théâtre a une vocation presque pédagogique, du moins de délivrer des messages ; or il peut y avoir un décalage entre la façon dont la pièce a été conçue à une époque et la façon dont il faut la mettre en scène à une autre époque pour que le message passe véritablement (notamment dans le langage, mais aussi dans les références, à des personnages ou événements phares d’une époque par exemple). Ce processus est donc rendu nécessaire par le rôle même théâtre, mais aussi (et cela va de pair) par ce qu’attend le public d’une pièce de théâtre (un minimum d’adaptation qui fait que le public va vraiment rire ou au contraire être vraiment ému, ce qui encore une fois n’est pas vraiment possible si les références aux faits, aux personnes, à la langue, sont trop éloignées) ; plusieurs visions peuvent aussi coexister à une même époque en fonction du public visé ou du lieu, des circonstances (écho à une actualité récente par exemple). Enfin, cela est aussi dans le travail même de l’acteur ou du metteur en scène : ce sont des artistes qui ont appris à jouer ou mettre en scène, mais dans un but bien précis : faire passer des messages, faire rire ou provoquer, donner des interprétations un tant soit peu personnelles, bref faire réagir le spectateur. C’est pour cela que leurs employeurs les paient et que le spectateur paie pour aller les voir !

3) Enfin, c’est aussi souvent une volonté, plus délibérée cette fois, de l’auteur toujours, qui souhaite que sa pièce traverse les siècles en continuant de délivrer ses messages, mais aussi que le texte vive, et notamment qu’il subisse plusieurs adaptations, parfois très différentes ; ainsi, le public se lasse moins, continue de découvrir et d’être surpris, et cela va dans le sens des deux volontés fréquemment rencontrées chez ces auteurs : rester à la postérité (rester des références lues, citées, mais pour cela il faut accepter quelques évolutions liées aux évolutions mêmes de la société) et participer à la réflexion et au cheminement intellectuel de ses concitoyens (pour cela, il faut au contraire accepter un peu de se détacher de son ½uvre, se laisser quelques portes ouvertes pour que d’autres y voient le moyen de s’y engouffrer et de s’en servir pour délivrer des messages complémentaires ou les mêmes messages mais sous une forme différente, ce qui va alors peut-être toucher d’autres personnes). Ce sont donc souvent les auteurs eux-mêmes qui provoquent ce processus par leur attitude, pour poursuivre leurs propres buts, remplir les propres objectifs qu’ils se sont fixés dans le cadre de leur écriture théâtrale.

Ainsi, progressivement, on peut montrer qu’en réponse à « pourquoi cette (re)création », la réponse globale qui peut être apportée est : « à cause des auteurs et du public essentiellement, en fait plus qu’à cause des acteurs et metteurs en scène eux-mêmes ; c’est en quelque sorte moins un choix qu’une réponse à une demande ou une incitation / invitation ». Ce peut être la réponse un peu plus personnelle et qui répond précisément à la question posée que vous pouvez apporter à la question au final ; l’important dans une dissertation est en effet d’apporter une réponse construite et réfléchie à la question posée, plutôt que de rester dans les généralités.

Votre plan montrait donc une compréhension fine du sujet mais ne rendait pas assez cette nécessité de répondre précisément à la problématique. La deuxième partie notamment posait un problème intéressant, mais dit ainsi cela reste périphérique, puisque vous ne dites pas précisément en quoi ce processus existe bien et pourquoi acteurs et metteurs en scène s’y prêtent. Je pense donc que vous avez tous les éléments en main pour bien mener ce devoir et j’espère vous avoir simplement aidé à recadrer quelque peu le propos et à répondre plus précisément à la question, pour répondre à votre crainte.

Bonne fin de travail sur ce devoir.
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