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Sujet / exercice : Commentaire composé sur l'épicurisme.
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Enoncé & travail préliminaire :  Bonjour,

je suis en licence et j'ai un commentaire composé (par thème et non linéaire) à rendre pour vendredi. C'est sur l'épicurisme. Il s'agit d'un devoir de latin mais le traitement du sujet se fait en français à partir d'une traduction française. Du fait qu'il s'agit d'un sujet se rapportant à la philosophie, j'ai pensé que vous pouviez me corriger cela. C'est un texte de Lucrèce, extrait de de la nature.

Le texte.

Eloge d'Epicure.
Si les travaux d'Hercule te semblent supérieurs,
tu t'éloignes bien plus du raisonnement vrai.
25 Du lion de Némée, gueule béante, ou du sanglier
hérissé d'Arcadie, qu'aurions-nous à craindre aujourd'hui ?
Que pourraient contre nous le taureau de Crète ou le fléau
de Lerne, l'hydre au rempart de serpents venimeux,
les trois puissants torses du triple Géryon,
30 Quel mal nous feraient les habitants du Stymphale,
les chevaux de Diomède soufflant le feu par leurs naseaux,
en Thrace, sur l'Ismère et les plaines bistoniennes ?
Enfin le fier dragon des Hespérides qui, l'?il féroce,
garde les brillantes pommes d'or, enlaçant leur arbre
35 de son corps monstrueux, comment nuirait-il donc
près des rives d'Atlas et des rigueurs de l'océan
où nul n'ose s'aventurer, ni Romain ni barbare ?
Ils ont tous disparu les monstres de ce genre
et, s'ils n'étaient vaincus, quel mal nous feraient-ils vivants ?
40 Aucun, je pense, tant la terre pullule de fauves,
tant l'horreur et l'effroi emplissent encore aujourd'hui
les fourrés, les grandes montagnes, les forêts profondes,
tous lieux que d'ordinaire nous pouvons éviter.
Mais si notre c?ur n'est purifié, quels combats,
45 quels dangers, devrons-nous affronter malgré nous ?
Quels soucis violents dès lors déchirent l'homme
tourmenté de passions, quelles terreurs aussi !
Combien d'orgueil, la débauche, l'emportement
exercent de ravages ! Et le faste, et la paresse !
50 L'homme qui, sans armes, par ses seules paroles
dompta tous ces monstres, les chassant de notre âme,
ne faudra-t-il l'admettre au nombre des dieux ?
Honneur d'autant plus mérité qu'il a divinement
des divins immortels tant de fois devisé
55 et nous a révélé l'entière nature des choses.

Mon commentaire est le suivant.

Le texte étudié se trouve au livre V du De rerum natura de Lucrèce. Nous rappellerons brièvement le contenu du livre V afin de mieux situer le passage étudié dans l'?uvre. Le livre V traite de la sociologie et de la cosmologie. Lucrèce dans ce livre évoque en premier lieu la formation du monde et souligne son caractère mortel ; il retrace ensuite l'histoire de l'humanité et de la terre avec l'évocation de la vie des premiers hommes et leurs grandes découvertes. Le livre s'achève sur un hymne au progrès et Lucrèce montre que malgré tout les hommes ne sont pas heureux. Le passage étudié est un extrait du premier texte intitulé par la traductrice éloge d'Epicure. Il s'agit du quatrième éloge de l'?uvre. Les quatre éloges informent le lecteur sur l'admiration qu'éprouvait Lucrèce pour Epicure. Il est important de souligner que d'un éloge à l'autre, il y a une gradation, plus on avance dans l'?uvre plus Epicure est assimilé à un Dieu et l'on trouvera cela dans notre passage. Après cette brève introduction, nous pouvons situer l'extrait dans l'éloge. L'éloge s'adresse à Memmius, destinataire « officiel » de l'?uvre. Lucrèce lui rappelle qu'Epicure est semblable à un Dieu qui a découvert la sagesse. Lucrèce va donc faire l'éloge d'Epicure en l'assimilant à un Dieu mais il fera cela de manière progressive ; il ne dira pas directement dans notre extrait qu'Epicure est un Dieu. Nous verrons donc en premier lieu comment Lucrèce met la mythologie, le Dieu Hercule, au service de la doctrine épicuriste, nous constaterons ensuite que les maux ne viennent pas des Dieux mais bien de la volonté des hommes ; enfin nous nous intéresserons en particulier à l'éloge d'Epicure. Dans cette étude nous montrerons surtout comment Lucrèce met en valeur la doctrine d'Epicure et Epicure.

Dès le premier vers de l'extrait étudié, Lucrèce prend appui sur les douze travaux d'Hercule afin de montrer que les hommes n'ont rien à craindre dans le monde. Lucrèce à ce propos souligne dans les deux premiers vers que si l'homme se sent incapable de combattre comme Hercule les maux, les « monstres du monde », c'est qu'il n'a rien compris à la doctrine épicurienne qui a pour but de conduire l'homme à la sagesse et de le libérer des craintes des Dieux et de la mort ; ainsi l'homme s'éloigne « du raisonnement vrai ». Lucrèce va donc démontrer à Memmius qu'il prend à parti avec l'emploi des pronoms personnels « te » et « tu » aux vers 23 et 24 et aussi au lecteur que comme Hercule a combattu les monstres du monde, les hommes n'ont plus à avoir peur de quoi que ce soit. Ainsi, Lucrèce en se servant de la mythologie, il défend la doctrine épicurienne. Il veut donc convaincre dans ce passage que la doctrine d'Epicure est fondée, qu'elle « tient la route », il en fait une apologie.

Nous allons maintenant nous intéresser plus précisément aux mythe d'Hercule et aux arguments qu'utilisent Lucrèce pour prouver aux hommes qu'ils n'ont rien à craindre sur terre. Il est important de rappeler qui est Hercule, les informations qui seront données ci-dessous sont tirées de l'ouvrage Les mythes Grecs de Robert Graves de l'édition livre de poche. Hercule est le fils d'une mortelle Alcmène et du Dieu Zeus qui pour séduire cette dernière a pris l'apparence de son mari. Lucrèce fait référence dans notre extrait aux douze travaux qu'Hercule devaient accomplir afin de devenir un Dieu suffisamment puissant pour protéger les hommes et les Dieux de la mort. Il ne cite pas tous les travaux effectués par Hercule seulement quelques uns sur lesquels nous allons revenir de manière concise. Au vers 25 il est question du lion de Némée qui est le premier travail que devait accomplir notre héros, il s'agissait de vaincre la bête gigantesque. Comme ni ses flèches ni sa massue en olivier n'avait d'effet sur la bête, Hercule l'étrangla à mains nus, puis il la dépeça et se servit de sa peau comme vêtement. Le second travail évoque Lucrèce est la prise du sanglier d'Erymanthe. Hercule poursuivit ce gigantesque animal jusqu'à ce que, fourbu, il tombe dans un ravin. Là Hercule sauta sur son dos et l'enchaîne avant de le ramener. Sur le chemin du retour, il rencontra les Argonautes qui partait pour la Colchide et s'embarqua avec eux abandonna le sanglier qui fut tué par un inconnu. Il fait référence ensuite à d'autres combats contre des montres mythologiques mais nous n'énumèrerons que le nom de ces différents travaux la capture du taureau de Crète qui dévastait les récoltes et menaçait la population de famine, L'hydre de Lerne qui était un monstre à neuf textes qu'il fallait décapiter toutes en même temps pour venir à bout de l'animal, au vers 29, il est question de la capture du troupeau de Géryon. Géryon était un homme qui possédait trois corps et qui passait pour être l'homme le plus fort du monde, il fallait le tuer pour récupérer son troupeau. Au vers 30, l'allusion à Stymphale fait référence à l'extermination des oiseaux du lac du même nom, ces oiseaux mangeaient les hommes, ils possédaient des ailes, un bec et des pattes en bronzes, Hercule les tua à l'aide de son arc et ses flèches. Enfin il est question de deux travaux celui de la cueillette des pommes d'or des Hespérides, pommes qui étaient gardées par un dragon, et celui de la capture des juments de Diomède, roi de Thrace qui nourrissait ses juments avec de la chair humaine.

Lucrèce utilise donc le combat d'Hercule contre les monstres de l'univers comme preuve que comme ces créatures n'existent plus, les hommes n'ont plus rien à craindre. Il est intéressant de remarquer que Lucrèce insiste dans son argumentation sur les lieux où Hercule s'en va combattre les fléaux, ainsi en mettant en valeur les régions de « Lerne, de Crète, de Thrace? », il souligne le fait qu'Hercule a combattu le monde. Nous pouvons ajouter que dans la traduction on trouve le champs lexical de la crainte avec les mots « craindre » au vers 26, les mots « fléau, monstre, monstrueux, nuire? » qui sont souvent mis en relation avec l'adverbe de temps « aujourd'hui » comme on peut le voir au vers 26 « qu'aurions nous à craindre aujourd'hui ? » ; ainsi Lucrèce veut montrer au lecteur qu'aujourd'hui toute crainte n'est plus grâce notamment à Hercule. L'auteur use aussi de l'interrogation oratoire à maintes reprises (aux vers 26, 32, 37 et 39) auxquelles ils donnent une seule réponse, sa propre réponse. Lucrèce s'investit donc dans l'apologue qu'il fait à son ami Mémmius, mieux il insèrera son opinion dans l'extrait, plus Mémmius adhèrera à ses propos. Quand il dit « je pense » ou plutôt « nil, ut opinor » dans la version latine, il apporte à ses questions une réponse personnelle « qu'aurions nous à craindre aujourd'hui ? Aucun mal » car il pense que même si les fauves et non les monstres existent nous pouvons les éviter puisque le monde est immense, il ne tient donc qu'à l'homme de les éviter.

Au fait que les hommes peuvent éviter les maux, Lucrèce pose une objection renforcée par la conjonction de coordination « mais » dans la traduction au vers 43. Il défend une nouvelle fois la doctrine d'Epicure et cherche à montrer aux lecteurs attentifs que les dangers qui existent sur terre ne viennent pas des Dieux mais sont la propre création des hommes. Au vers 44, Lucrèce n'accuse pas les hommes mais souligne que même s'ils suivent la doctrine d'Epicure, ils peuvent être confrontés à des dangers indépendamment de leur volonté, ce qui s'exprime dans la traduction par « malgré nous ». l'originalité de l'auteur ici est qu'il s'inscrit dans le récit ; il n'exclut pas le fait que lui aussi peut être facilement en danger contrairement à sa volonté. Son inclusion dans le discours est mis en évidente par l'utilisation dans la version latine des pronoms personnels suivants « nisi » et « nobis ». Le « nous » dans les deux versions peuvent ce comprendre de deux façons comme le fait qu'il englobe Lucrèce et Memmius ou qu'il englobe Lucrèce et les humains ; alors l'apologie devient universelle.

Il réfléchit ensuite sur quatre vers à partir du vers 46 sur la nature des maux des hommes, sur la nature du danger. Il trouve comme réponse les passions qu'ils énoncent clairement « l'homme tourmenté de passions ». Il s'agit de rappeler que dans l'éthique épicuriste les désirs sont au nombre de trois. Il y a d'abord les désirs dits « naturels et nécessaires » dont la satisfaction est indispensable à la vie comme manger, boire et dormir ; ensuite les désirs dits « naturels mais non nécessaires », désirs dont on peut se passer sans porter atteinte à la vie comme par exemple manger un repas raffiné ou donner libre cours à ses appétits sexuels. Enfin les désirs dits « non naturels et non nécessaires » comme l'ambition, le désir du pouvoir, de la richesse, la passion amoureuse, en un mot toutes les passions. Donc nous pouvons dire que lorsque Lucrèce aux vers 47 et 48 énumèrent les différentes sources de dangers qui sont « l'orgueil, la débauche, l'emportement, le faste, et la paresse » ; il parle des désirs dits « non naturels et non nécessaires ». En dénonçant cela, Lucrèce résume la doctrine épicurienne et explique ce que doit faire l'homme pour devenir un véritable épicurien : Il doit être « maître de lui et de ses passions ; pratiquer la tempérance en modérant et en calculant ses désirs ; raisonner ses actes en ne se laissant pas aller aux excès de la chair et en dédaignant les plaisirs grossiers ; cultiver par ailleurs l'amitié qui jour un rôle fondamental dans le bonheur ».Ainsi, Lucrèce après avoir énumérer les qualités que doit avoir un sage épicurien peut faire l'éloge d'Epicure.

Il est important de souligner que l'éloge d'Epicure ne se trouve pas seulement dans les derniers vers de l'extrait mais commence comme nous l'avons dit dans l'introduction dès le début du livre V. dans ce passage, Lucrèce assimile explicitement et implicitement Epicure à un Dieu. Il le dit d'abord clairement dans la partie qui précède le texte de notre étude c'est-à-dire au vers 8 lorsqu'il dit « deus ille fuit » ou plutôt oui « disons-le, ce fut un Dieu ». Ensuite il l'assimile implicitement à Cérès qui est la déesse romaine des moissons « on dit que Cérès fit connaître le blé aux hommes » ou encore à Liber qui est la divinité de la fertilité au vers 15 « et Liber la liqueur née du jus de la vigne » ; et enfin à Hercule au début de notre texte. De plus de façon plus implicite encore, en expliquant la doctrine l'auteur dresse le portrait de ce que doit être la sage épicurien et donc de ce qu'est Epicure, un sage contraire aux hommes. L'éloge prend de l'ampleur à la fin du texte, nous y attacherons plus d'importance ici.

Au vers 48, il faut comprendre le terme « homme » comme étant Epicure. Dans ce vers, Lucrèce boucle le passage étudié et renoue avec Hercule. Il montre Epicure comme un héros du langage qui grâce à sa doctrine a su combattre les maux des hommes « les monstres ». au vers suivant, l'auteur propose aux lecteurs d'élever Epicure au rang des Dieux « ne faudra-t-il pas l'admettre au nombre des dieux ? ». Nous pouvons rapprocher ces quelques vers des vers 65 et 66 de l'éloge du livre 1 « quand pour la première fois, un homme, un Grec, osa la regarder en face, l'affronter enfin ». cela permet d'isoler Epicure de la race « humaine », de le prendre comme un être unique, exceptionnel : Comme un Dieu. Afin de convaincre les hommes du caractère divin d'Epicure, Lucrèce lui prête de nombreuses qualités comme « l'honneur, le mérite » et lui prête aussi l'adverbe « divinement » qui le rattache définitivement au rang des dieux. De plus il le sépare des « divins immortels » au vers 54 pour mieux l'élever parmi les dieux. On a donc uns sorte d'apothéose d'Epicure ici qui est élevé au rang des Dieux et qui comme un Dieu peut à présent « révélé l'entière nature des choses », l'entière nature du monde aux hommes.

Pour conclure, nous soulignerons l'originalité de cet éloge d'une part du fait que Lucrèce pour mieux divulguer la doctrine épicuriste s'inscrit lui-même dans le discours à maintes reprises dans le passage et donne lui-même son opinion sur la façon de concevoir les choses ; conception qu'il tient d'Epicure. L'originalité de ce passage tient aussi dans la faon dont le sujet est traité, au lieu d'élever directement Epicure au rang des Dieux, Lucrèce comme nous l'avons vu utilise le mythe d'Hercule pour mieux justifier la doctrine et annoncer ce qu'est le vrai sage épicurien, sage qui est contraire aux hommes du fait qu'il évite les maux causés par la passion dans ce texte. Aussi nous pouvons dire que Lucrèce en s'incluant dans son apologie et en affirmant ces faiblesses invitent le lecteur et son ami Memmius à adhérer à l'épicurisme ; Lucrèce dévoile ici son talent d'orateur. Enfin, ce dernier éloge qui montre l'apothéose d'Epicure a un grand intérêt car il met un point final sur les autres éloges et achève leurs progressions ; en effet d'homme grec qu'il était au livre I, et de père et de découvreur au livre III, au livre V Epicure se transforme en Dieu et c'est le grand intérêt de ce texte : L'apologie d'Epicure et de l'épicurisme est à son comble.

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