en une : Le raisonnement par récurrence

Dissertation

Francais (college, lycee) > sujets expliqués - 14/12/2007 - correction
                
Bonjour,

Dans le cadre des prestations proposées ici, je vous propose de voir quel est la problématique posée par le sujet, ainsi que divers points de méthode qui nous permettront d’identifier les principaux axes de réflexion et de commencer à construire un plan. La difficulté du sujet qui vous est ici proposé est la précision de son champ d’investigation : la notion de plaisir à la lecture d’un conte philosophique est déjà une notion très précise par rapport à tous les rôles de l’apologue par exemple, thème plus large, et qu’il faut l’appliquer à quelques ½uvres bien définies qui plus est. Cela veut dire qu’on attend bien sûr la même chose que pour une dissertation habituelle (réponse construite, précise et illustrée, progressive, répondant à la question posée par le sujet et rien qu’à elle), mais qu’ici il va falloir avoir des arguments précis dès le début, pas de généralités, et surtout point important, qu’il va falloir extraire des exemples très précis de chaque ½uvre, avec analyse poussée dans le cadre du sujet pour chacun de ces exemples. A la limite, cela se rapproche presque plus d’une dissertation sur une ½uvre, mais à travers un filtre précis. Un des critères majeurs sera donc ici votre capacité à citer les ½uvres et analyser des passages précis, arguments pointus à l’appui. Je vous propose de prendre « Candide » comme exemple fil rouge, et vous pourrez alors transposer ce que nous allons voir sur « Micromégas » notamment, mais cela nous donnera déjà une bonne approche.

Avant tout, il faut commencer par définir précisément tous les mots du sujet :
- « plaisir » : vous pouvez commencer par la définition du dictionnaire bien sûr, mais il est ici essentiel de se concentrer sur le fait que le plaisir est ressenti par le lecteur en dehors l’intellect au début ; la notion de plaisir est liée dans un premier temps à celle de simplicité, de spontanéité ; il y a donc un premier plaisir immédiat (et il faudra d’ailleurs dans le développement déterminer lequel plus exactement), en dehors de toute réflexion ; vient ensuite un plaisir plus profond, qui peut prendre plus de temps, et porter sur d’autres thèmes, selon des mécanismes plus complexes ; il y a quelque chose de simple et de sans arrière-pensée dans le plaisir, quelque chose qui touche nos sens avant notre esprit ;
- « lecture » : il faut y voir là encore un double mouvement : la découverte instantanée du texte puis le mouvement de retour, la pensée, la mémorisation, le retour après coup etc. ;
- « conte philosophique » : je vous laisse retourner vers votre cours pour en trouver la définition ; ce n’est pas forcément difficile à écrire à partir de vos cours, mais c’est vraiment la notion centrale avec celle de plaisir dans ce sujet, et il faut l’appliquer assez rapidement au cas de Voltaire : donner par exemple quelques spécificités liés à des exemples précis (par exemple à travers ses thèmes favoris, ou mieux encore dans ce sujet qui fait d’emblée la part belle à la forme avant le fond comme nous allons le voir ensuite plus précisément) ;

La problématique apparaît clairement depuis le sujet : « pourquoi peut-on dire que le conte philosophique procure du plaisir au lecteur ? » et il faut alors classer les grands types de raisons qui expliquent cela. Chaque partie du plan devra ensuite répertorier et détailler une catégorie possible d’explications.

Ce travail de définition préalable fait, on peut penser à l’introduction qui doit s’organiser comme suit :
- on amène le sujet par un sujet plus vaste (ou en en venant directement à l’½uvre de Voltaire à replacer dans le cadre du siècle des Lumières, siècle de pensée et de rationalité, dans lequel le plaisir, notamment littéraire, n’était pas pour autant absent) ;
- on définit les mots du sujet ;
- on pose la problématique ;
- on annonce le plan.

En terme de plan justement, si l’on reprend à la fois les caractéristiques essentielles du conte philosophique tant sur le fond que sur la forme (type de narration, d’histoire, style des auteurs et ici surtout de Voltaire, procédés stylistiques, thèmes majeurs, buts, critiques etc.) et ce que l’on a dit sur le plaisir auparavant (avec notamment cette double facette), il apparaît assez clairement et rapidement que ce plaisir va venir à la fois du fond et de la forme. Pour aller dans un ordre progressif comme toujours en dissertation, on peut par exemple commencer par la forme puis aller vers le fond, cela correspond bien au mouvement qui se passe en nous : touche nos sens d’abord puis notre intellect. D’une cette proposition de plan possible :

1) c’est l’art du conte, celui du conteur qui nous procure du plaisir : le conte philosophique a toujours une histoire simple et intemporelle que tout le monde peut comprendre (Candide est à une certaine époque dans son château de Westphalie, ce qui donne en plus une notion de rêve), on est dans le conte « il était une fois » etc., bref on retrouve tout un tas d’éléments du conte traditionnel, dans « Candide », vous en avez de nombreux : lieu, date, simplicité et idéalisme des personnages, cohorte de bons sentiments, monde merveilleux où tout va bien (noblesse riche, abondance, pouvoir etc.). On est presque dans un conte de Disney, pour caricaturer, mais tous les éléments séduisants du conte sont là : tout est simple pour sue tout le monde puisse comprendre, accrocher rapidement et s’y transporter sans difficulté. Dans cette partie, il vous faudra donc reprendre les différents éléments du conte (presque tout court) et les organiser pour montrer que ceux du conte philosophique s’inscrivent eux aussi totalement dans cette notion de plaisir ;

2) on passe ensuite plus dans le fond en commençant à aborder la partie philosophique de ces contes, mais en restant encore dans la forme, sorte de liaison intermédiaire ici entre les deux aspects : on s’intéresse au rire, au comique dans le conte philosophique. En effet, le conte philosophique ne se contente pas d’être plaisant, attirant et créateur de rêve, il arrive aussi à faire rire, puisque le rire, la dérision, font partie des outils à la disposition de l’auteur pour convaincre. Les moyens sont multiples et vous pouvez les étudier plus précisément ici dans cette seconde partie : il y a le comique (notamment basé sur les mots ridicules, les noms de discipline utilisés par Pangloss, les noms des personnages comme Vanderdendur, les phrases de Pangloss, mais aussi sur les situations, comme dans l’épisode de la danse des trésoriers pour trouver le coupable, ou encore un comique plus osé, comme dans la rencontre avec la fille de mauvaises m½urs). Les recours du comique sont donc nombreux (reprenez les types habituels de comique pour les étudier : de geste, de mot, de situation, de caractère avec l’étude des personnages etc.). Le comique dévie aussi parfois sur la parodie, par exemple des romans de chevalerie et de guerre ici, l’humour, parfois noir, comme sur le champ de bataille, l’ironie, arme favorite des philosophes des Lumières dans ce type de conte. Ici, on se concentre donc sur ce qui fait rire ou sourire, avant dans une deuxième partie de voir le but en lui-même, le message ;

3) en effet, le plaisir vient aussi des messages délivrés, des réflexions permises par la lecture, de ce qu’elle apporte moins immédiatement mais plus profondément sûrement. Ici, vous allez retrouver tous les thèmes habituels de l’apologue : la métaphysique (incarnée ici par Pangloss), qui va relativement de pair avec la religion (avec le personnage du religieux rencontré au Portugal), mais aussi la science (on parle quand même du siècle « éclairé » justement avec son lot de découvertes scientifiques et d’interrogations en la matière, comme l’événement du séisme de Lisbonne, cela interroge et plait aussi de pouvoir réfléchir dessus et d’essayer de se faire une idée. La critique touche aussi le domaine politique, social etc. Cela permet aussi de critiquer, de se moquer de personnes de l’époque à mots cachés, de tourner en dérision des théories de l’époque ou des personnages, de se moquer voire « se venger » par un intermédiaire pour certains. Le message en lui-même et rien que le fait qu’il soit ainsi aussi délivré simplement parfois peuvent donc aussi procurer très simplement et plus ou moins directement du plaisir.

Voilà donc pour une progression en trois points, entre lesquels il faut ménager des transitions pour montrer la progression logique : le charme du conte tout court en quelque sorte, puis le rire, le comique, la parodie, qui est un des moyens favoris de l’auteur et enfin les messages au service desquels ces moyens de forme sont utilisés : on va du fond à la forme, progressivement. Je vous ai donné aussi quelques pistes d’exemples à partir de « Candide » pour illustrer les notions ; ces notions ne sont pas je pense foncièrement difficiles à comprendre, mais vous devez les définir précisément à chaque fois dans le cadre voltairien et les illustrer par des exemples précis. Vous voyez donc que malgré l’étroitesse première du sujet, tout ce que vous savez sur la parodie, les moyens de dérision etc. dans ces ½uvres peut être réutilisé à condition d’être précis et d’organiser l’ensemble. En conclusion, vous pouvez alors montrer que la force de ces ½uvres est de donner un plaisir multiple obtenu à partir d’un subtil mélange fond / forme qui touchent l’ensemble du lecteur en même temps.

Il vous reste donc à affiner les exemples et l’organisation des idées plus particulièrement, encore une fois cette précision pour arriver à une réponse finale à la problématique est essentielle. Bien sûr, tout cela va de pair avec les habituelles remarques de style que vous connaissez : orthographe, rédaction, transitions etc.

En espérant vous avoir éclairé sur ce sujet et vous avoir permis de voir qu’avec un peu de méthode tout sujet, même pointu, est abordable pour arriver à un résultat satisfaisant et honorable, je vous souhaite bon courage.
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