en une : Le raisonnement par récurrence

Commentaire

Francais (college, lycee) > sujets expliqués - 12/10/2007 - correction
                
Bonjour,

Dans le cadre des prestations proposées ici, nous allons voir ensemble comment construire le commentaire composé et l’alimenter (même si les deux axes de lecture vous sont directement donnés dans le sujet) ; ensuite, vous pourrez si vous le souhaiter proposer dans le cadre d’une autre question votre devoir rédigé avant de le rendre à votre professeur, et ainsi obtenir une correction et un avis détaillé et personnalisé dessus.

Première étape en présence d’un texte de commentaire composé : situer si possible le passage dans l’½uvre, et recueillir quelques informations sur l’auteur, le courant littéraire, le contexte etc. Déjà cela vous donne des idées de thèmes à approfondir si les axes ne vous sont pas donnés dans le sujet comme ici, ensuite cela peut vous éviter quelques contresens (connaître le point de vue de l’auteur sur telle question parce que l’on a étudié telle ½uvre ou tel mouvement littéraire permet de gagner du temps, d’orienter la réflexion et surtout de ne pas mal interpréter, de partir dans de fausses directions). L’extrait à commenter est un passage du « Gargantua » de Rabelais (période Renaissance, XVIème siècle). L’ouvrage fait partie d’une trilogie consacrée aux géants Gargantua et son fils Pantagruel. Toute la première partie de l’ouvrage nous raconte l’enfance (démesurée) de Gargantua : petite enfance, parents, éducation, découverte de la vie etc. C’est un ouvrage humaniste, qui critique donc par le rire les travers de son temps (notamment le trop plein d’éducation et beaucoup d’autres traits de la situation). Dans cette ouvrage, tout est donc en apparence rire, démesure voire ridicule et invraisemblable pour ramener aux choses essentielles et critiquer certains travers en faisant réfléchir. Dans une seconde partie, Gargantua va mener ce que l’on appelle la guerre picrocholine, du nom de Picrochole, souverain d’un autre royaume. On est ici dans la dénonciation de la guerre et la politique de l’époque. Tout est venu d’un incident provoqué par des soldats de Picrochole dans les vignes d’une abbaye du territoire de Gargantua et son père. Dans cette abbaye, vit le frère Jean dont il est question ici et qui va prendre part à cette guerre (la guerre des fougaces, sujet de discorde dans les vignes entre les deux parties), qui apparaît oh combien futile et ridicule ! Mais Frère Jean est un guerrier et au sein même de l’abbaye, il va bien vite prendre les choses en main pour affronter l’ennemi, comme il le fait très exactement dans le passage qui nous intéresse ici. Voici pour le contexte de l’½uvre et celui de l’écriture de Rabelais : la démesure, le rire voire l’irréel sont donc là pour faire ressortir les traits humains et ceux de nos sociétés les plus condamnables (« plus c’est gros, plus ça marche » en quelque sorte).

Dans votre introduction, vous commencerez donc par resituer brièvement le passage dans le reste de l’½uvre puis présenter l’action du passage en elle-même : cet épisode de guerre mené par Frère Jean dans lequel il va défendre son abbaye et combattre les picrocholins ennemis à tout prix et de la façon dont cela nous est décrit. Ces deux choses faites, il faudra alors annoncer le plan, c’est-à-dire vos axes de lecture. N’oubliez pas que votre introduction doit être relativement précise et dynamique pour donner une bonne première impression et donner également les éléments de contexte qui vont permettre de mieux comprendre les analyses faites ensuite et l’histoire analysée. Nous reprenons ensuite les deux axes de lecture. D’un point de vue méthode, n’oubliez pas de manéger une transition entre ces deux axes : bilan de la première étude et annonce de la suivante avec un petit lien logique entre les deux. Rappelez-vous également que le commentaire composé est un exercice qui même à la fois le fond et la forme : vous devez partir du texte et l’analyser en parallèle dans le fond (les idées émises par l’auteur) et la forme (les temps employés, le type de vocabulaire, les figures de style : comparaison, métaphore etc.) et relier sans cesse les deux. De même, vous devez citer précisément le texte, par petits bouts toutefois (rarement une phrase d’un seul coup, sauf si elle est très courte) et vous devez incorporer cela dans votre rédaction, de manière assez naturelle (« Rabelais revient ensuite sur cette condamnation de la religion de façon plus précieuse en mentionnant que ‘….’, mais également que ‘… ‘. Cette double métaphore insiste sur … » etc.). Incorporez le texte à votre rédaction. Enfin, souvenez-vous qu’à la fin du devoir, tout le texte devrait avoir été cité en entier, surtout quand il est assez court comme ici : votre commentaire doit en théorie être parfaitement compréhensible par quelqu’un qui n’a pas le texte sous les yeux, d’où l’importance de remettre en contexte dès le départ, de citer par petits bouts et d’analyser le fond et la forme aussitôt après, et enfin de marquer des temps de résumé comme dans les transitions.

Premier axe : « une parodie de roman de chevalerie » : Rabelais se moque ici des romans du Moyen-Age et tente de les ridiculiser en grossissant les traits qu’ils employaient pour les tourner en ridicule et en accentuant sur les aberrations. Théoriquement, le roman de chevalerie présente un héros jeune et beau, prêt à tout pour défendre sa belle, courageux, fort et intelligent mais aussi loyal et fidèle à des valeurs nobles et chevaleresques : au final, quand on lit ces romans, on n’a presque pas l’impression de voir un homme en train de guerroyer et risquer sa vie ! Voyons comment cela se traduit ici (je vous aide à reprendre les idées principales, il vous faudra ensuite reprendre l’ensemble du texte dans cette optique de façon à bien tout commenter) :

- l’habit et l’arme du chevalier : habit très léger (rien à voir avec une armure), arme qui est un simple bâton et apparemment complètement usé (cf. fleurs de lys, qui sont pourtant le symbole de la royauté française) ;

- les soldats (qui déposent les armes rapidement pour aller boire le fruit des vignes, armée pas très professionnelle et performante …), et ils sont même comparés à des porcs (nombreuses comparaisons avec les animaux d’ailleurs) ;

- le début du texte montre cette critique par un décalage fond / forme : un récit haletant, précis et bref au passé simple qui raconte des faits risibles avec un décalage dans les expressions comme fleur de lys / passées ;

- la violence des actes, un décalage complet avec les principes de la chevalerie (rien de bien joyeux pour une princesse à séduire, c’est plutôt bain de sang et charcuterie), on n’est pas dans l’élégance et le défi individuel, chevalier contre chevalier, mais bien dans la boucherie totale et collective (certains sont tués par derrière, de façon un peu lâche alors qu’ils tentent de s’enfuir ou retourner la situation : pas très chevaleresque non plus, pas de pitié pour les « vieilles connaissances »); il y a un certain acharnement sur les viscères, le corps même une fois l’adversaire tué ou quasi-mort ; on est plus dans la cruauté que dans la chevalerie.

Voilà pour les principaux éléments à reprendre pour cette partie (cités à peu près dans l’ordre où ils apparaissent dans le texte) ; il vous faudra ensuite les classer en paragraphes, en allant toujours du plus simple et plus évident au plus compliqué et moins évident au premier abord, en citant les passages concernés et allier toujours encore une fois, c’est l’une des principales exigences du commentaire composé, fond et forme : vous explicitez l’idée et montrer comment elle est mise en relief : temps employés, ponctuation, rythme de la phrase, figures de style etc.

Faisons le même travail pour le second axe : « une satire cruelle de la religion » : Rabelais critique de nombreux traits de la religion catholique ici, pour montrer qu’elle est parfois en dehors du temps et que parfois elle se contredit, ne peut être prise complètement au sérieux, et de même pour ce qu’elle dit. La satire est cruelle dans un double sens ici : déjà parce que bien sûr Rabelais la met en scène dans une véritable scène de boucherie (nombreux morts, qui plus est de façon bien cruelle c’est vrai), ensuite parce que la critique est à l’emporte-pièce, assez brutale et peu nuancée :

- déjà le principal personnage qui est le principal attaquant et l’auteur du massacre est un homme de Dieu, c’est donc assez choquant et cela sert à dénoncer à la religion : même ceux qui en appliquent en théorie parfaitement toutes les exigences peuvent se livrer à des faits peu glorieux, voire pire que le reste des hommes (ils restent eux-mêmes des hommes) ;

- ce qui est plus particulièrement choquant dans l’attitude de Frère Jean : il utilise ses attributs religieux (croix, habits etc.) pour se battre et tuer (tuerie qui a lieu dans une abbaye qui plus est) ; il s’acharne : on le voit en mouvement, tuant tout ce qui bouge, comme s’il avait perdu la tête ; il n’ a pas de piété, bien au contraire, il demande même aux autres d’achever le « sale boulot » en égorgeant les survivants : satire cruelle ici, pas de doute, pour toutes les raisons données juste avant.

- passage sur les victimes en appelant à certains saints : on voit ici que ces croyances sont tournées en ridicule (déjà par les saints nommés, qui paraissent de moins en moins connus et de plus en plus faux : critique de cette pratique de donner des saints à toutes les catégories et d’y faire appel à tort et à travers). Cela ne sert à rien devant un homme plus fort que soi et comme fou (même si c’est un home de Dieu) : de telles incantations ne peuvent pas nous sauver dans ces cas-là ; la religion ce n’est pas toutes ces croyances. Les pauvres gens, comme dit Rabelais, ne sont pas sauvés par leurs croyances, malgré toutes les promesses.

Voilà les principaux points à aborder dans ce second paragraphe ; encore une fois, pensez bien à relever les critiques faites en elles-mêmes ainsi que la façon dont l’écriture les met en relief.

Pour finir et compléter les conseils de méthode, pensez également à soigner la conclusion, derrière impression laissée au correcteur : vous faites un résumé précis et concis de votre étude en rappelant les idées fortes et concluant sur l’idée majeure défendue dans l’extrait pour montrer que vous en avez rendu ici une lecture détaillée, exhaustive, exacte et un peu personnelle (moins ici, puisque ceci se juge surtout à la qualité des axes choisis, qu’il faut d’ailleurs malgré tout annoncer en début de grande partie par une phrase ou deux). Comme les axes vous sont donnés, le jugement se fera surtout sur la qualité des explications, la façon dont vous analysez et reliez fond et forme, et sur la forme du devoir en elle-même (rédaction, orthographe, présentation etc.).

Sur ces dernières recommandations, je trouve bon courage et bon travail.
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