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Réussir son commentaire d'histoire

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VUE D'ENSEMBLE

C'est l'un des deux exercices universitaires de base dans les études d'histoire avec la dissertation, et lorsqu'ils ont le choix, les étudiants préfèrent le plus souvent le commentaire : c'est malheureusement souvent du commentaire dont ils se tirent le plus mal, faute de maîtriser l'exercice.

Pourtant c'est le premier travail de l'historien, qui doit d'abord lire des documents, des sources d'époque, puis écrire, c'est-à-dire construire un récit historique, émettre des hypothèses à partir de ces sources. Pour vous, c'est d'abord cela : un entraînement à la lecture des sources, de la matière première de l'histoire. Mais c'est aussi un exercice qui vous permet de réunir les exemples indispensables à la rédaction de ses dissertations.
Les conseils qui suivent vous permettront peut-être d'éviter les écueils du commentaire.

COMMENT LIRE UN TEXTE HISTORIQUE ?

1. Comprendre
2. Expliquer et interpréter

Quelle attitude adopter face à un texte ? La question qui doit guider le lecteur, la seule à se poser est : que m'apprend ce texte ? Quel est son intérêt pour l'historien ?
L'étudiant qui planche sur un commentaire a toujours affaire à un texte choisi, qui a toujours un intérêt. Son travail est de le mettre à jour : quelle est l'originalité du texte ? ou au contraire son caractère représentatif ? quel problème historique éclaire-t-il ? La réponse à cette question générale pour tout texte suppose deux étapes au moins :

- Que l'on comprenne le contenu du texte
- Que l'on l'explique et l'interprète c'est-à-dire qu'on lui donne un sens.

1. Comprendre

La première étape se fait au brouillon : l'élucidation, de sorte qu'aucun mot ne reste inexpliqué ou flou. Cela signifie qu'il faut s'assurer que tous les mots du texte sont compris dans leur contexte historique. La première chose à faire est donc d'élucider tous les faits, événements, lieux, dates, noms, mots techniques ou anciens, qui apparaissent dans le document. Il faut définir, rendre explicite et clair pour tous et pour soi les mots du texte. Il faut notamment dater et situer précisément le texte. S'il s'agit d'un exercice à la maison, ayez recours aux dictionnaires, aux atlas etc..

Commencez, au brouillon, à relever, en plusieurs colonnes, les mots à définir, les noms à éclairer, les dates à expliquer, les allusions à préciser. Relisez plusieurs fois le texte avec cette liste sous les yeux. Rien ne doit vous échapper.
Au brouillon également, interrogez-vous sur les limites du document :
le titre fait-il partie du document (est-il d'origine ou ajouté ? à commenter ou s'en servir ?)
les références en bas du document en font-elles partie ? Ne confondez pas les références de l'édition avec celles de l'auteur, ne vous fiez pas à elles pour une indication de date.

2. Expliquer et interpréter

Une fois que le texte ne recèle plus aucune difficulté factuelle, il faut l'interpréter et lui donner un sens : pourquoi le texte dit-il telle chose ? Comment parle-t-il de cette chose ?

Pour cela, un premier exercice à faire au brouillon est de recenser les mots du texte et de repérer les répétitions, les contradictions, les oublis aussi. Pour donner un sens au texte, il faut révéler les intentions qui expliquent les répétitions, contradictions, silences, ou simplement les assertions. Cela signifie qu'il faut mettre à jour la logique qui a guidé le rédacteur. C'est le premier devoir d'un commentaire : saisir la logique interne du document, celle qui a guidé le rédacteur, et seulement dans un deuxième temps la critiquer.

Repérez les mots importants qui reviennent : comptez les occurences. L'auteur essaye peut-être de marteler une idée derrière ce mot.

Repérez les synonymes employés : sont-ils anodins, n'y a-t-il pas de glissement de sens ? Dites-vous que rien n'est fortuit.

Il faut entrer dans la logique du rédacteur : suivre sa pensée en partant du présupposé qu'il est plus intelligent que nous et qu'il en sait plus sur sa période que nous, se couler dans la pensée d'un autre. La démarche est inverse de celle adoptée dans une dissertation où c'est vous qui pensez et parlez. Cela suppose d'être compréhensif : évitez les absurdités ou naïvetés, en prétendant que l'auteur " se trompe " trop rapidement. Si l'auteur ne dit pas telle chose, en général c'est qu'il a une bonne raison de ne pas le faire ou qu'il n'avait aucune raison de faire autre chose. A vous de découvrir cette raison.
Au brouillon encore, construisez le schéma du texte. Cette analyse peut vous permettre de reconnaître les choses les plus importantes.

Ensuite seulement on peut être critique. C'est-à-dire critiquer cette logique que vous avez mise à jour : que révèle-t-elle ? L'auteur cherche-t-il à abuser ou convaincre le lecteur ?

CONSTRUIRE LE COMMENTAIRE

1. l'introduction
2. le plan et le développement
3.La conclusion

1. l'introduction

C'est une étape cruciale qui rassemble l'essentiel de votre commentaire, qui est à soigner donc.

Elle contient trois grandes parties :

- La critique externe du document (auteur, date, contexte, nature et finalité du doc, analyse brève)
- La problématique
- L'annonce du plan.
Ce sont là des passages obligés de l'introduction.

Avant de vous y lancer, il faut que vous trouviez une phrase de départ, une façon de capter l'intérêt du lecteur qui soit brève et ferme. Il n'y a pas de "truc", mais une règle d'or : ne jamais commencer par " ce texte est... ".

a. Nature

La définition de la nature d'un document est loin d'être une futilité : la finalité du document apparaît plus clairement si la nature est bien définie. Elle doit l'être avec plus ou moins de précision, suivant notamment la période étudiée. En général, on peut distinguer trois grandes catégories de texte :

littéraire (chroniques, histoires, lettres...)
normative (lois, règlements, capitulaires....)
acte de la pratique (contrat, testament...)
A l'intérieur de chacune de ces catégories, il existe des sous-catégories : la précision de leur définition croît à mesure que vous progresserez dans les études d'histoire.

b. Auteur

Vous pouvez très bien ne pas le connaître ; mais on vous en voudrait de ne rien savoir de Charlemagne, même s'il est hors de question de raconter sa vie par le menu. Au contraire, resserrez votre biographie sur les éléments qui ont un rapport avec le texte. Il peut être intéressant, quoique risqué, de distinguer l'auteur du rédacteur, lorsqu'il s'agit d'un texte de loi, par exemple. Charlemagne n'a sans doute pas écrit lui-même, du moins pas seul, ses grands capitulaires. Que savez-vous de sa chancellerie ? Il y a souvent, dans l'entourage des grands auteurs de textes historiques, des personnages influents auxquels revient la paternité de ceux-ci.

c. Contexte

C'est là un point très important, puisque la connaissance que vous avez du contexte, et votre capacité à l'exposer, va vous permettre d'expliquer l'intérêt du document. Soyez habile : resserrez le plus possible le cadre chronologique autour du texte dans votre exposé. Et pensez qu'il peut y en avoir deux : celui de l'événement décrit, et celui de la rédaction (les deux dates peuvent être fort éloignées).

d. Analyse

Faire l'analyse du texte dans l'introduction n'est pas toujours une obligation. Mais c'est un étape très utile à la compréhension du texte, à faire au moins au brouillon.

e. Problématique

Définir une problématique est indispensable, et en réalité, assez facile. En pratique, la problématique découle, surgit de la mise en relation du contexte et de la nature, de la découverte de la fonction ou finalité du texte. Il s'agit de montrer que le texte éclaire un problème historique. Cette problématique constituera le fil directeur du commentaire.

2. le plan et le développement

En pratique, la démarche la plus simple et la plus fidèle à l'exercice est de suivre la progression globale du texte, afin de mettre en valeur la logique interne du texte. Le plan suivra donc, chaque fois que c'est possible, pour ses granedes parties la progression du texte, mais pas pour ses sous-parties: pas de paraphrase, ni d'explication linéaire, les sous-parties doivent être thématiques.

Dans cet esprit, vous pouvez utiliser la démarche suivante : découpez le texte en parties logiques et affectez leur un titre.

Mais ne vous interdisez pas un plan thématique, plus habile dans le cas d'un document divisé en articles ou d'un acte de la pratique (contrat, par exemple).

A chaque thème, une partie. Mais n'oubliez pas de revenir au texte, à l'intérieur de ce plan.

En rédigeant, ne négligez pas de donner les définitions, d'éclairer les allusions du texte. Essayez de faire progresser votre commentaire.

Un bon conseil : détaillez le plus possible votre plan au brouillon, en notant les références au texte (pour ne pas avoir à chercher au dernier moment, dans l'urgence : c'est alors qu'on n'y voit plus rien).
Un second bon conseil : en rédigeant, faites des paragraphes, en respectant cette règle d'or : un paragraphe par idée, une idée par paragraphe, un phrase ou un mot du texte par idée et par paragraphe.

3. la conclusion

Son but est de répondre à la problématique, la question posée dans l'introduction. C'est aussi l'occasion d'évoquer la portée du document (a-t-elle été immédiate, ou à plus long terme ?). Et vous pouvez glisser quelques mots de l'historiogaphie de la question.

Soignez la conclusion (comme tout le reste). Ecrivez quelques phrases bien senties, sans digression. Ne vous lancez pas maintenant dans de nouvelles spéculations (vous auriez du le faire plus tôt).

EN BREF

Il y a deux écueils à éviter :

- la paraphrase, risque principal quand on s'attache à la mise en valeur de la logique d'un texte. Pour éviter la paraphrase, condensez, rendez compte plutôt que répétez.

- la dissertation : le texte n'est pas un support pour un exposé de votre savoir ou de vos lectures, pour traiter un problème historique indépendant. Ce problème est le fil conducteur du commentaire mais pas le tout. Les connaissances doivent permettre d'expliquer le document (élucider les faits), le document ne doit pas être utilisé comme illustration du savoir. Aucune connaissance inutile à la compréhension du texte ne doit y figurer. Il faut commenter tout le document mais rien que le document.
En pratique : partez toujours d'un phrase, d'un mot du texte, dans chaque sous-partie, et à chaque paragraphe, et non de votre savoir pour aller vers le texte.